Monsieur
Laurent Delahousse
95mn | 2018
L’existence de Jean d’Ormesson ressemble à un roman. Un roman solaire. Au soir de sa vie, l’écrivain se demande pourtant s’il a écrit le chef-d’œuvre qu’il portait en lui. Pour combler ce doute, il écrit sans répit. La dernière ligne posée, le livre achevé, son esprit vagabonde déjà à l’idée d’une nouvelle source d’inspiration. Un livre, encore un. Peut-être le dernier. L’écriture n’est plus une fin, c’est un moyen. Une fuite en avant contre le temps. Monsieur est le récit d’un crépuscule, celui d’un homme, d’un monde. Comment mieux comprendre notre monde qu’à travers les yeux d’un homme qui y vit depuis près d’un siècle ? Comment mieux appréhender le futur qu’en apprenant du passé ? En filmant.
Éternel hédoniste, tout au long de son existence, Jean a cherché à louer la beauté du monde et des hommes… Des femmes, surtout. Ce film souhaite s’interroger sur son message. Il faut le voir comme une ode à la vie. Une ode mélancolique où le spectateur pourra pénétrer dans l’univers de Jean : un monde onirique, méditerranéen, solaire. Parfois grave, également. À l’heure de la culture de l’instantané et de la dictature de l’urgence, Jean nous offre la possibilité de retrouver, un temps, un monde contemplatif où la poésie règne en maître et où la réflexion prime sur l’idée, les mots sur les chiffres. La beauté sur les maux.
Chose tellement rare, l’écrivain qui n’aimait pas les montres ne paraît pas en effet se régler sur le temps universel mais sur son propre rythme intérieur. Plus ample, plus lent que notre société contemporaine. Il faut voir ce film comme une intrusion dans l’espace-temps de Jean. Un temps condensé, étiré, réel ou abstrait. Ainsi, derrière l’univers solaire, éclatant et poétique de ses récits fantasmés, se dévoile des heures passées à écrire, chaque jour. Derrière ses yeux pétillants et son sourire se cache une réalité plus grave et plus sombre : la vie qui s’écourte et l’impuissance d’un homme face à sa propre finitude. Derrière les paysages apaisants et lumineux d’un décor printanier ou d’une chaude journée d’été se profile déjà l’ombre de l’hiver. Plus froid. Plus noir. Intraitable.
Le mot du réalisateur
Finalement, ce film résulte d’une envie : comprendre qui est Jean d’Ormesson. Réellement. Qui se cache derrière l’un des plus grands esprits français de notre époque ?
Quid de l’aristocrate, de l’écrivain du bonheur, du séducteur invétéré ? Ce sont les failles et les faux-semblants du personnage qui ont confirmé mon envie de réaliser ce film. Observer cet homme au crépuscule de son existence avec toute la gravité et la fragilité que cela suppose.
— Laurent Delahousse.
Monsieur
Réalisé par Laurent Delahousse
Musique : Julien Doré
Production : Magneto Presse/ la Bambola
Distribution : Mars Films
Durée : 95 mn
Sortie en salle le 5 décembre 2018