Haut Karabakh
Une paix fragile ?

Six mois après la fin des hostilités au Haut Karabakh, Xavier Muntz et Gaspard Thierry-Karoglan sont allés en Arménie et dans les territoires reconquis par l’Azerbaïdjan pour mesurer les conséquences du cessez le feu, à la rencontre de l’histoire des vaincus et de celle des vainqueurs.

En Arménie, le séisme de la défaite fait encore trembler la société civile. Crise politique, afflux de familles déplacées, destruction des infrastructures, perte territoriale. Le premier ministre, accusé de traitre par l’opposition,  doit faire face à une population profondément divisée. Dans une tentative d’apaisement, il a annoncé des élections anticipées pour juin et a finalement accepté de démissionner fin mars.

Le bilan humain est très lourd pour ce petit pays de 3 millions d’habitants. On dénombre plus de 10000 blessés et près de 4000 morts. Mille six cents soldats sont toujours portés disparus. Leurs corps sont restés sur les champs de bataille passés aujourd’hui sous contrôle azerbaidjanais. Des parents, comme Samuel Mkhitaryan, ont dû s’organiser eux-mêmes pour récupérer la dépouille de leurs enfants en territoire ennemi.

En Azerbaïdjan, le pays s’est lancé dans une course à la reconstruction. Les territoires reconquis sont dévastés. Pendant trente ans, ils ont servi de zone tampon de sécurité.  Un territoire militaire, où les mines représentent un danger invisible et permanent. Elles ont coûté la vie à des dizaines de civils depuis la fin des combats. Xalid Humbetov, maire de la ville de Sukuvushan a réussi à obtenir une autorisation pour se rendre dans sa maison natale. Elle est toujours occupée. Les soldats azéris ont remplacé les soldats arméniens. Il faudra encore beaucoup de temps avant qu’il ne puisse s’y réinstaller avec sa famille.

Des deux côtés de la frontière, la défiance du voisin et les haines engendrées par des années de guerres meurtrières semblent miner l’avenir. Garants des accords de paix, les soldats russes déployés dans la région imposent leur mandat avec fermeté. Mais beaucoup se demandent si cette présence suffira à établir une paix durable au Haut Karabakh.